Billet d'humeur de la semaine : Pénibilité au travail

Le débat sur la réforme des retraites est lancé et chacun y va de ses analyses et de ses propositions. Une de celles du MEDEF m’interpelle en tant que médecin : il est préconisé que la reconnaissance de la pénibilité se fasse sur la base d’un examen médical.

Mais pourquoi entraîner les médecins dans cette galère ?

La raison en est la contestation d’un certain nombre de ces critères, comme le port de charges lourdes, dont le motif est en fait de limiter le nombre de salariés concernés pouvant bénéficier d’un départ à la retraite anticipé.

C’est ainsi que la loi Bachelot a exclu les infirmières de la catégorie active qui leur permettait de partir 5 ans plus tôt contre un changement de statut et de maigres augmentations de salaires.

Dans le cas présent deux critères de pénibilité se cumulent : « le travail en équipes successives alternantes » et le « travail de nuit » dont la réalité pour les infirmières et d’autres personnels n’a pas besoin d’un certificat médical.

Quand on regarde les chiffres, il est facile de comprendre la crainte du MEDEF.

Les régimes spéciaux tant décriés et qui permettent de partir avec une retraite complète en bénéficiant d’une bonification ne concerne aujourd’hui que moins d’un million de salariés alors que, malgré l’exclusion de certains critères, les six actuellement reconnus concernent aujourd’hui plusieurs millions de salariés.

Or le mécanisme du compte pénibilité mis en place par la loi est une usine à gaz basée sur une accumulation de points qui ne donnent que des droits réduits.

En ce qui concerne les métiers de la santé, la pénibilité n’est pas contestable, est directement liée au métier et ne peut être prévenue du fait de la nécessité d’assurer la permanence du service public 24 h sur 24, 365 jours par an.

Les conséquences de la non prise en compte de cette pénibilité constitue aujourd’hui un des motifs des abandons de carrière de très nombreux personnels de santé.

Pour exemple, il existe aujourd’hui 200 000 infirmières en âge de travailler qui ont renoncé à leur métier. Pour les aides-soignantes, le chiffre n’est pas connu mais les estimations sont encore supérieures.

Une des pistes pour redonner de l’attractivité à ces métiers qui peinent aujourd’hui à recruter, est de prendre réellement en compte leur pénibilité en agissant sur plusieurs leviers.

Il y a bien entendu les salaires et la durée hebdomadaire de travail avec une revendication simple qui est la semaine de 32 h sur 4 jours pour sortir de l’évolution actuelle mortifère du travail en équipe de 12 h réclamé par les jeunes professionnels justement pour avoir plus de jours de repos. Mais la question de la bonification de 5 ans pour le départ en retraite est incontournable pour compléter le dispositif, afin d’espérer avoir demain encore des personnels de santé en nombre suffisant.

Car ces derniers qui s’occupent de la santé des autres, n’acceptent plus de sacrifier la leur dans un système qui les méprise et qui ne prend pas en compte leur utilité pour la société.

Dr Christophe Prudhomme

 

 

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